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Fusion des Universités à Aix-Marseille : Qu'est ce qui change ?

Un bref aperçu de ce qu'est l'A.M.U.

L'Université Aix-Marseille (A.M.U.) c'est un type d'université bien spécifique, qui se dessine avec la mise en place de plusieurs obscurs conseils décisionnaires :

"Des instances d’aide au pilotage sont mises en place pour aider la gouvernance et les conseils statutaires à la prise de décision stratégique : un Comité de prospective stratégique (CPS) qui rassemble des personnalités du monde académique et du monde socio-économique ; un Conseil d’orientation du système d’information (COSI) ; un Conseil d’orientation de la politique patrimoniale (COPPAT)."

CPS quoi ? COSI quoi ? COPPAT quoi ?

  • Le CPS (Comité de Prospective Stratégique) : Comme nous l'indique doctement le site de l'A.M.U : "Le Comité est consulté sur l’ensemble des relations qu’entretient l’Université avec les milieux économiques, les entreprises en particulier. Il a vocation à émettre des avis sur l’adéquation entre formation et emploi, sur la politique pédagogique et scientifique de l’Université, sur la politique de valorisation et de recherche technologique, en fonction des attentes du monde économique. Il peut également formuler des propositions dans ces domaines."

Vous avez chaud ? C'est normal. On lit bel et bien ici le grand engagement, -la gouvernance?- du monde économique -des grandes entreprises?- dans le sein même de la faculté fusionnée. Relisez, tout est clair. On marchandise désormais vos études.Vous l'aurez bien compris, les ambitions toutes neuves de l'A.M.U. sont orchestrées très stratégiquement par ce que l'on appelle les "personnalités extérieures", liées au monde économique...

(PS : vous pouvez faire un tour sur l'outlet spécialement dédié aux entreprises sur le site de l'A.M.U., vous verrez, tout ça est bien réel : c'est juste ici.)

  • Le COSI (Conseil d’orientation du système d’information) : Toujours sur le site de l'A.M.U. : "Le Conseil a pour mission de préparer le schéma directeur du système d’information de l’université en cohérence avec le contrat d’établissement, de suivre la mise en œuvre de la stratégie et des projets et d’assurer la veille concernant les outils pédagogiques et de communication mis à disposition des étudiants et des enseignants."

Ici, on veille à ce que la stratégie soit bien mise en place. Mais si ! vous savez : la stratégie du CPS.

  • Le COPPAT (Conseil d’orientation de la politique patrimoniale) : "Le comité a pour missions de préparer les schémas directeurs d’aménagement patrimonial et immobilier, d’étudier les chartes environnementales, techniques et handicap, d’étudier les contrats de performance, de proposer des réaffectations de surfaces, d’évaluer le maintien de la qualité du patrimoine dans le temps et l’usage des espaces affectés aux départements et laboratoires.", toujours issu du site de l'.AMU. Depuis 2012, il est dirigé par le Président d’AMU et est composé de l’ensemble des Vice-Présidents, Directeurs de composantes, du Directeur Général des Services et de la Directrice de la DDPI. C'est un Conseil plein de jolies promesses de grandeur et de patrimoine, de rayonnement régional et national.

Vous voulez d'autres noms de Conseils pompeux ? Je vous invite à vous informer ici - page officielle de l'A.M.U. Prenez des pincettes !

Bref, bref, bref. En fait, tout ça, c'est dans quel but ?

Et bien cela assoit une gouvernance toujours plus centralisée. Ça assure à la "gouvernance" la "gouvernabilité" via une apparente cohérence, travaillée par le combo gagnant communication + valorisation. L'objectif de la com', c'est bien le lissage de l'opinion en amont.

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Mais alors, dans le cas de l'A.M.U., qui siège au CPS ? Qui se cache derrière les instances décisionnaires ?

Ci-dessus, un extrait du plan Pluriannuel mis en place par l’AMU, où il est édicté noir sur blanc que la collaboration avec, et la guidance vers le monde socio-économique tient un rôle prédominant dans les objectifs que se fixe l’établissement. Défi relevé par l’AMU, puisque siègent au sein de son Conseil d’Administration restreint, 8 « personnalités extérieures » (décret de la Loi Fioraso — pour que les entrepreneurs « y voient plus clair » dans l’organisation universitaire...), dont Mme Michèle Boi, directrice régionale de l’emploi chez Électricité de France (EDF), ainsi que M. Johan Bencivenga, le président de l’Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône, une émanation du Mouvement des entreprises de France (Medef).

Tiens donc, E.D.F. à la gouvernance de l'Université d'Aix-Marseille... Certainement pas sans profit ! Il se trouve que l'on voit naître des licences dites « professionnalisantes » au sein de l'A.M.U. En effet, il est maintenant possible à Aix-Marseille de suivre des Masters «Modélisation et expérimentation des matériaux pour le nucléaire» et « Génie des procédés appliqués au nucléaire », que l’entreprise Electricité De France., siégeant au Conseil d’Administration d’A.M.U. depuis janvier 2016, s’est fait tailler sur mesure !

Ben oui, parce que vous vous doutez bien que ce sont eux, les marchandises. Donc en parallèle à l'ouverture des filières abordées plus haut, qui vont laaaargement profiter à E.D.F. et au rayonnement économique de l'A.M.U., et bien il y a les autres filières. Vous savez, celles que l'on appelait autrefois les "Humanités". Je m'explique :

Les universités fusionnées comme l’AMU vont également vers une volonté de destruction du concept-même d’U.F.R. (Unité de Formation et de Recherche), pour une gouvernance et des instances décisionnaires plus centralisées.

Les filières portant vers les Humanités (sciences humaines, langues, lettres...) sont les premières visées dans ce processus de restriction. L’AMU a ainsi réuni 6 UFR en un seul — dans un seul et même bâtiment. Alors naît l’UFR nommé « Lettres, Langues, Arts, Sciences humaines et sociales », dirigée par Pierre-Yves Gilles. Ce dernier énonce qu’il a pour but de « croiser des disciplines et de répondre en commun à des appels à projets ». En réalité, quel est le sens de cet UFR, sorte de fourre-tout, sinon celui de reléguer des filières qui ne seraient — peut-être — pas d’une grande utilité au « rayonnement » international et économique de l’AMU ? Gilles admet tout de même : « nous n’avons pas encore décidé si nous conservions certaines formations qui doublonnent entre Aix et Marseille ». Une hésitation qui en dit long sur les intentions de l’AMU quant aux filières citées plus haut.

*Biatss (ou Biatoss) = Personnels ingénieurs, administratifs, techniques, sociaux et de santé et des bibliothèques.

L’AMU, depuis la fusion, compte 8000 personnels, dont 4500 Biatss. Seulement, comme nous le montre une enquête menée par la C.G.T. Marseillaise sur la santé des personnels depuis la fusion, les différents (et nombreux) pôles de gestion des personnels mis en place depuis la fusion ne cessent de se renvoyer la balle quant aux revendications des salariés de l’AMU.

En effet, 70% des 2200 personnes ayant répondu à une enquête de l’Unsa par rapport au moral des salariés ne se disent pas enthousiastes pour l’avenir de l’établissement. On mesure chez les salariés un « malaise qui s’enracine à l’université ».

Pourquoi ? Parce que ces sondages ont « permis de mesurer le stress qui a accompagné la fusion, l’absence de perspectives liées aux incertitudes de financement, le sentiment d’un immense gâchis et les pressions en tous genres sur un système public, où la sélection par l’échec sera un jour dépassée par une entrée à l’université plus sélective (droits d’inscription). » — La Marseillaise

Les revendications des personnels Biatss se font pressantes. Depuis la fusion, plus de 70% d’entre eux disent avoir vu leurs conditions de travail se dégrader. Cela prend également en compte le fait qu’ils ne se sentent plus reconnus au sein de l’AMU. Leurs revendications portent sur : « des procédures simplifiées (72%), des créations d’emplois pour alléger les charges et favoriser le travail en équipe (près de 40%), une meilleure prise en compte de leur avis dans les prises de décisions (70%). » — La Marseillaise

La gouvernance centralisée de l’AMU semble pourtant faire la sourde oreille. Yvon Berland, président de l’AMU depuis 2015, affirme se rendre sur le terrain fréquemment (quel effort!), et édicte clairement qu’avec les 8000 personnels de l’AMU,

— « le dialogue existe. Dire que rien ne marche, quand cela vient toujours des mêmes personnes, on n’y fait même plus attention ». Bon résumé du sentiment d’insécurité —au niveau du moral et du salaire— qui s’accentue chez les personnels de l’Université d’Aix- Marseille.

Si l'on résume les changements dus à la fusion des universités d'Aix et de Marseille, on obtient donc :

- Des ambitions de rayonnement international de l'A.M.U., de domination du bassin méditerranéen orchestrées par des instances centralisées à la merci du monde socio-économique et des ses acteurs influents.

- L'organisation en de nombreux conseils et comités obscurs, avec pour but d'annihiler totalement la personnalité juridique des universités.

- L'apparition de filières "professionnalisantes" taillées sur mesure pour les "personnalité extérieures" décidant de l'organisation universitaire (Medef, E.D.F...).

- La relégation de filières sans lien prédominant avec le marché économique/du travail.

- La destruction du concept d'UFR.

- La marchandisation du savoir et des études supérieures.

- La démoralisation des personnels Biatss, et leurs revendications étouffées.

Et pour en savoir plus : cet article super du Monde Diplomatique sur l'A.M.U. !

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